Abdijmuseum Ten Duinen
Collectie
Figuur 2: Leisteenfragment met ingekraste (lege) notenbalken (Foto Abdijmuseum inv. nr. 043528)

Article du 19.03.2021

Dans la société actuelle, la musique est omniprésente. Où que vous alliez, vous êtes confronté à la musique. Par ailleurs, la musique est un puissant phénomène social; elle constitue souvent un pont entre différents groupes ou générations. Il n'est donc pas surprenant que de nombreuses personnes attendent impatiemment les festivals d'été annuels. Il serait impensable de passer un jour sans musique. Mais comment les gens percevaient-ils la musique autrefois? Quel rôle jouait la musique dans la vie abbatiale médiévale, mais aussi au quotidien? Dans un blog précédent, nous avons fait connaissance avec les dessins incisés sur des fragments d'ardoise trouvés à Duinenabdij. Certaines pièces remarquables avec des portées gravées sont expliquées plus en détail dans ce blog. Sur la base de ces découvertes, nous tenterons de trouver une réponse aux questions ci-dessus.

Gravures musicales sur ardoise

Nous pouvons distinguer trois catégories de gravures musicales sur ardoise. La première catégorie contient des ardoises sur lesquelles sont gravées des portées vides. Les ardoises servaient à enregistrer la notation musicale (temporaire) et étaient effacées après usage. Ces ardoises étaient probablement recouvertes d'une couche de cire blanche sur laquelle on pouvait tracer les notes de musique à l'aide d'une plume. Le papier était coûteux et plus exclusif. En outre, la couche de cire pouvait facilement être lissée pour que l'ardoise puisse être réutilisée. Les ardoises peuvent être utilisées pour apprendre des compositions ou pour entraîner la voix.


Environ sept fragments d'ardoise, trouvés dans l'Abbaye des Dunes, appartiennent probablement à cette catégorie. Les portées sont composées de cinq lignes, rayées entre 2,5 et 4 mm parallèlement entre chacune d'elles. Dans l'un des fragments, elles sont perpendiculaires à une double marge. (Images 1, 2 et 3)

Leisteen met ingekraste, niet gevulde, notenbalken  (Foto Abdijmuseum inv. nr. 040495)
Leisteen met ingekraste, niet ingevulde notenbalk  (Foto Abdijmuseum inv. nr. 040692)
Figuur 2: Leisteenfragment met ingekraste (lege) notenbalken (Foto Abdijmuseum inv. nr. 043528)

En Belgique, des fragments d'ardoise similaires ont été trouvés à Mechelen, Oudenaarde, Brugge, Raversijde en Fosses-La-Ville. A Raversijde, un fragment d'ardoise a été trouvé ainsi que quelques instruments de musique, tels que des guimbardes et des sifflets à eau. On peut également classer dans cette catégorie les fragments d'ardoise de l'abbaye de Prémontré près de Laon (Aisne), le collège de Cambrai à Paris et l'école du chapitre de Saint-Sernin à Toulouse, en France. (Image 4) 

Figuur 4: Een leisteenfragment uit de abdij van Prémontré (Aisne)  (Foto Galmiche et al, 2019)

La deuxième catégorie rassemble les ardoises dont la notation musicale est délibérément gravée. Les ardoises ont été utilisées comme matériaux temporaires pour la composition. Il est probable que celles-ci ont été jetées après avoir été copiées. Des exemples de fragments d'ardoise de cette catégorie ont été trouvés à Somerset en Grande-Bretagne, ainsi qu'à Rennes, Beauvais, Vauclair et Vitré en France. (Image 5) Un fragment d'ardoise portant la notation d'un cantus firmus a également été trouvé à Gand dans une fosse à ordures en 1993. (Image 6)

Figuur 5: Het leisteenfragment met ingekraste muzieknotatie uit Beauvais  (Foto Chailley, 1979, 53)
Figuur 6: Het leisteenfragment met ingekraste cantus firmus uit Gent  (Foto Schreurs, 1995, 125)

La troisième catégorie est constituée d'ardoises ayant un usage plus permanent, par exemple pour mémoriser la musique des choristes. Les ardoises contiennent des fragments de musique plus longs et sont souvent complétées par des annotations de texte. Les portées gravées et complétées de Smarmore en Irlande et d'Utrecht aux Pays-Bas appartiennent à cette catégorie.

Gravures musicales sur d'autres objets

Les portées sur ardoise ne sont pas les seules gravures musicales trouvées sur les objets de la collection du Musée de l'Abbaye. Dans le puits du grand bâtiment de l'Abbaye des Dunes, une assiette en étain coulé a été découverte portant sur le bord extérieur un cachet de la crosse ainsi que le monogramme de l'abbé Robrecht de Clercq (1519 - 1557). De nombreuses traces d'utilisation sont visibles, mais si vous regardez attentivement, vous verrez également une portée sur laquelle sont gravées une douzaine de notes (Images 7 et 8). Nous ne savons pas à qui appartenait réellement cette assiette, après l'abbé et son entourage. On peut uniquement spéculer sur la personne qui a rayé la notation musicale et sur la raison de son geste. Peut-être que la personne a eu une inspiration musicale pendant le dîner, ou qu'elle avait une rengaine agaçante en tête, dont il fallait se défaire.

Figuur 7: Gegoten tinnen bord met staf en monogram van abt Robrecht de Clercq  (Foto Abdijmuseum inv. nr. 040307)
Figuur 8: Detail ingekraste muzieknotatie op het tinnen bord (Foto Abdijmuseum inv. nr. 040307)

Muzikale graveringen werden dus ook op andere voorwerpen ingekrast. Zo werd bijvoorbeeld op zowel het berkemeier glas gevonden tijdens opgravingen van het Saint Mary’s Close in Utrecht, Nederland, als een uit Italië tekst en muzieknotatie ingekrast. Zelfs op de kerkmuren van de in Norfolk in Groot-Brittannië is er muzikale graffiti aangetroffen.

Les gravures musicales étaient donc gravées également sur d'autres objets. Par exemple, des textes et des notations musicales ont été grattés à la fois sur le verre Berkemeier découvert lors des fouilles de l'enceinte Sainte-Marie à Utrecht, aux Pays-Bas, ainsi que sur un couteau de service provenant d'Italie. Des graffitis musicaux ont même été découverts sur les murs de la cathédrale de Norwich, à Norfolk, en Grande-Bretagne.

La musique au Moyen Âge

La majorité des fragments d'ardoise comportant des gravures musicales se trouve dans des contextes religieux. Mais également en présence d'une école, comme à Smarmore, Paris, Toulouse et Vitré. Ce qui indique l'utilisation de ce type d'ardoise dans l'éducation musicale.

Werd er in Ten Duinen muziekles gegeven aan de monniken, lekenbroeders of bezoekers? Of gaat het hier om onafgewerkte aantekeningen op leisteen? Muziekeducatie was zeker vanaf de 15de eeuw een onderdeel van de opvoeding, aangezien muziektheorie beschouwd werd als een wetenschappelijke discipline. De Lage Landen speelden dan ook een toonaangevende rol in de ontwikkeling van de West-Europese muziek, voornamelijk in de ontwikkeling van de polyfonie of meerstemmigheid. 

Est-ce que la musique était enseignée aux moines, aux frères laïcs ou aux visiteurs de l'Abbaye des Dunes? Ou s'agit-il de notes inachevées sur l'ardoise ? L'éducation musicale a certainement fait partie de l'enseignement à partir du 15e siècle, puisque la théorie musicale était considérée comme une discipline scientifique. Les Pays-Bas ont d'ailleurs joué un grand rôle dans le développement de la musique d'Europe occidentale, notamment dans le développement de la polyphonie ou de la polyphonie de voix.

La musique occupe également une place importante dans la vie des abbayes et des couvents médiévaux, tant chez les cisterciens que dans d'autres ordres et communautés. La musique était considérée comme la proclamation de la Parole divine. Si la musique est répertoriée, nous le devons à l'Église chrétienne. Sous le pape Grégoire le Grand (590-604), tous les hymnes de l'église ont été arrangés et enregistrés pour la première fois, d'où le terme de musique "grégorienne". Avant cela, il était d'usage de transmettre la musique par tradition orale.

En outre, les cisterciens ne sont pas seulement un mouvement réformateur au sein de l'ordre bénédictin, ils sont aussi des réformateurs de la musique grégorienne. Dans le cadre de la Règle de Benoît, les cisterciens recherchent l'authenticité. Ils avaient également cette attitude envers la musique liturgique. Leur recherche du chant grégorien le plus "authentique" a conduit à une réforme générale du chant grégorien.

L'Idesbald musical

Malgré le grand nombre de manuscrits conservés provenant de l'Abbaye des Dunes, le nombre de manuscrits documentant la vie musicale de l'abbaye est relativement faible. Ce qui est remarquable, c'est la variété des formes de notation musicale dans les manuscrits conservés. (Image 9) Idesbald aussi, qui devint abbé en 1155/56, aurait été un cantor très passionné. Il est donc probable que l'Abbaye des Dunes avait une culture musicale dédiée dès le début.

Figuur 9: AGSB 50/66, f 42r, kwadraatnotatie op drie lijnen uit een missaal (Foto © Grootseminarie Brugge)

En revanche, le peuple commun était principalement en contact avec la musique par l'intermédiaire d'artistes ambulants et de goliards. Les goliards étaient souvent des étudiants nomades et des membres du clergé. Ils étaient connus pour leur consommation d'alcool, leur vacarme et leurs débats intellectuels. Leurs rassemblements étaient souvent accompagnés de musique. Les musiciens et les goliards étaient surveillés avec beaucoup de préjugés et de suspicion de la part des contemporains, notamment des ecclésiastiques. La position sociale des musiciens médiévaux séculiers ne correspondait donc clairement pas au prestige dont jouissent nos artistes contemporains.

La notation musicale dans l'Abbaye des Dunes ne se limitait manifestement pas aux sources écrites. On trouve également des portées et des notes de musique gravées sur des ustensiles et des fragments d'ardoise. La musique a donc probablement joué un rôle important dans l'Abbaye des Dunes.

Scources:

  • Berthon, A. Amélie. ‘Les ardoises gravées et inscrites : un support d’écriture opportuniste à la fin du moyen âge et à l’époque moderne.’ Cahiers LandArc 14 (2016): 1-7.
  • Schreurs, Eugeen. Anthologie van muziekfragementen uit de Lage Landen: Polyfonie, monodie en leisteenfragmenten in facsimile (Middeleeuwen – Renaissance). Leuven, 1995.
  • Galmiche, Thierry en Vincent Buccio. “Les ardoises gravées de l’abbaye de Prémontré (Aisne), un support de notation musicale aux xve-xvie siècles.” Archéologie médiévale 46 (2016): 123-134.